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Louise de Vilmorin, entre ombre et lumière








 

 

 

 

 

 

 

 

Vilmorin un nom connu des jardiniers ! Et oui, Louise grandit dans la célèbre famille de botanistes et grainetiers, du même nom. Ne disait-elle pas elle-même : « Car enfin, il faut le dire, nous sommes des marchands de graines ! » Certes, mais elle baigne dès son enfance dans un univers de raffinement, d’érudition dans le château familial de Verrières-le-Buisson en banlieue parisienne. Une roseraie, un potager, un verger, une serre, des essences rares offrent à Louise dès son enfance un territoire magique. En 1917, le père, pour qui Louise nourrissait une grande affection meurt. Comble de son malheur, elle ne s’entend pas avec sa mère. Louise de Vilmorin aime séduire. Ses conquêtes amoureuses lui inspireront son recueil Fiançailles pour rire. C’est un des soupirants de sa mère, un américain, Henri Leigh-Hunt, consul honoraire de Monaco à Las Vegas, qu’elle épousera en 1925. Elle quitte la France pour un ranch du Texas, où elle s’ennuie. La naissance de ses trois filles ne la comble guère. Elle multiplie ses absences et ses liaisons, avec André Malraux, Gaston Gallimard et Jean Hugo, le petit-fils de Victor. En 1937, elle divorce. La garde des enfants est confiée au père.

Elle se remarie avec le comte Palffy, un aristocrate hongrois, qui règne sur d’immenses propriétés en Europe centrale. Comment résister à ce séducteur, qui joue du piano, chante des airs tziganes et chasse le tigre en Inde ? En dépit de la guerre, ces années seront les plus belles de sa vie, entre le château de Pudmerice, devant lequel s’arrête l’Orient-Express, et Vienne, Berlin, Budapest et Bucarest. Elle y rencontre toute la vieille aristocratie européenne et s’éprend de la nature sauvage des Carpates. En 1951, son sixième roman, Madame de, est un immense succès adapté au cinéma par Max Ophüls. Le temps des honneurs et des Mémoires est venu, celui aussi des invitations aux premières émissions culturelles de radio et de télévision. Elle s’y livre sans tabou, tissant sa légende, exprimant son ardeur de vivre et d’écrire pour ne pas vieillir. Une opération esthétique et un deuxième coup de foudre pour André Malraux la réconcilient avec son miroir. Le ministre de la Culture règne désormais sur son salon bleu avec une solennité crépusculaire qu’elle n’aura pas le temps de ré-enchanter. Louise de Vilmorin meurt en 1969. Ses poèmes admirables révèlent l’infinie mélancolie qui l’habitait profondément.

 

PRIERE

Seigneur, venez à mon secours,

Tendez-moi votre main si grande

Qu'elle est le dôme des amours,

Des océans, des monts, des landes,

De l'éternel et de nos jours.

 

Tendez-moi, Seigneur, ne serait-ce

Qu'un de vos doigts pour m'y poser,

Emmenez-moi me reposer

Loin de tout ce qui me délaisse

Et loin de ce que j'ai osé.

 

Écartez-moi de la rivière,

Conduisez-moi sur le chemin

Qui mène au cœur de la prière,

Tendez-moi votre grande main

D'où sort la nuit et la lumière.

 

Tout m'est trop proche et trop lointain,

Mon cœur est mort, mon âme pleure,

Le temps ne m'apporte plus d'heure,

Mes battements se sont éteints

Sous un pas quittant ma demeure

 

J'ai rendu le dernier soupir,

Seigneur, écoutez la prière

De celle qui voudrait dormir.

Baissez mes rouges paupières

Car j'ai grand sommeil de mourir.

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